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13 juillet 2010 2 13 /07 /juillet /2010 16:34

 

Au menu de la soirée débat du 19 avril

 

John Irving est un long-distance runner, comme dirait Alan Sillitoe, un marathonien. Ses livres sont des pavés qui concurrencent en épaisseur et en poids les inévitables - façon de parler, on peut les éviter, c'est ce que fait ce blog - best-sellers estivaux, s'ils s'en distinguent par un souci littéraire et un humour qui donnent, ainsi qu'il est d'usage, des résultats inégaux; le meilleur étant peut-être "Une veuve de papier", caracolant, soutenu, ample, drôle, émouvant .

Vérifier ce que donnerait ce romancier luxuriant et foisonnant sur la courte distance de la nouvelle est l'une des curiosités de ce recueil. Le résultat est, lui aussi, inégal ; d'une part, le conteur ne peut ni déployer de multiples rebondissements picaresques et burlesques aussi aisément qu'il le fait dans ses romans de six cent pages, ni s'attacher à dépeindre avec force détails les ressources et ressorts psychologiques des personnages. En revanche, on y trouve les éléments qui auront donné ce tour à son talent, tout en bâtissant les fondations de son succès; l'humour débridé et l'érotisme tempéré, ainsi qu'une langue habile et souple.

A tort ou à raison, le nouvelliste est souvent considéré comme une extension du territoire poétique en contrée de prose, avec les attributs afférents : sensibilité exquise, âme fragile et déchirée, sentiments élevés. Irving, c'est tout le contraire : plutôt un colosse qui intimide par sa force et sa vitalité d'ancien lutteur - un peu, nonobstant toute évaluation littéraire, le genre Victor Hugo. Du bois dont on fait les chênes, à remplir douze bibliothèques et mourir octogénaire. A cette aune, "Mon dîner à la Maison-Blanche" est une heureuse surprise. Invité par Ronald Reagan, ce démocrate bon teint et plein d'autodérision - caractéristique des intellos de gauche made in USA, commune, à Roth, Ford, Mc Inerney, ...- accepte de s'y rendre, après moult hésitations et conciliabules conjugaux burlesques. Disons juste, pour ne rien déflorer qu'il ne s'y couvrira pas de gloire. Un écrivain de talent, drôle et imaginatif, mésestimé pour cause de trop grand succès, modèle implicite en France d'un Jean-Paul Dubois. 

 

John Irving, « Mon dîner à la Maison-Blanche »

in « Les rêves des autres », Seuil, 1993.

DISPONIBLE

Lecture-voyage.

Document réalisé par L. LE TOUZO, le 9 juillet 2010

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