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19 mai 2010 3 19 /05 /mai /2010 14:15

Comme à chaque fois que je me retrouve coincé dans une impasse, je vais pour sortir passer par la case football. Connaissez-vous Camel Meriem et Mourad Meghni ? Ce sont deux talents avortés du foot français, prématurément intronisés successeurs de Zinedine Zidane, pour de mauvaises raisons ; mêmes origines maghrébines, même poste de meneur de jeu. Ils n’avaient pas le dixième de son talent technique, ni le centième de sa force mentale – ou l’inverse. Bref, deux beaux gâchis, mais qui ne projettent nulle ombre portée sur notre icône nationale. Hé bien, n’était la notoriété, incommensurable, il serait juste de considérer Bernard Frank comme un Zidane de la chronique littéraire, que ne devraient pas obérer de pâles épigones, plus usurpateurs qu’héritiers.

En effet, vous avez sur le bout de la langue les noms d’une demi douzaine de chroniqueurs censément littéraires, qui nous assomment de leurs opinions hâtives et schématiques, tout en se dorlotant d’une immense estime de soi. Patrick Besson est le plus connu d’entre eux. Bernard Frank est leur grand oncle, mais cette digression longue d’une vie mêlant livres parcourus plutôt que lus, réflexions gastronomico-idéologiques, films vaguement entrevus et rencontre avec quelques hommes remarquables, il en aura à la fois créé et achevé le genre, fermant la porte ou brisant le moule derrière lui. Rien ne serait plus injuste que de le lire à l’aune de ses pathétiques imitateurs.

De 1985 à 1989, Frank a écrit chaque semaine dans « Le Monde » - c’était son journal, sis au « 5, rue des Italiens », comme « L’Equipe » était celui de Blondin -, ajoutant, nota un observateur narquois, « à la vertu d’y écrire, le vice de bénéficier de ses tirages ». Cocktail séduisant et assoupli de désinvolture et de littérature, tapisserie des jours suprêmement écrite, autobiographie dénuée de centre de gravité, sinon les livres des autres : bref, une fresque. La mauvaise foi guide le protagoniste, qui n’est pas dupe : ce journalisme supérieur ne remplacera pas la littérature qu’il n’écrira plus. Le chat qui fait sa pelote, entre patte de velours et griffe de cristal, est une image qui sied à Frank S.A. Que d’orgueil dans ce renoncement surmené : mais le résultat en sera ce miracle, quatre années durant, dans un journal où de tels défauts sont surabondants, un quart de page hebdomadaire ni ennuyeux ni moralisateur. Après viendront les redresseurs de torts et autres chevaliers blancs, mais cela est une autre histoire.

 

  Bernard Frank, « 5, rue des italiens », Grasset, 2007.

DISPONIBLE.

Lecture-savoir.

Document réalisé par L. LE TOUZO, le 7 mai 2010

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