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25 mai 2010 2 25 /05 /mai /2010 10:33

Les biographies, c’est vraiment la bouteille à l’encre. Attention, un jeu de mots – d’une extrême sophistication - est dissimulé dans la phrase précédente. Dans un cas, le biographe paie l’obole à son idole, et le résultat en serait à faire passer Jdanov pour un insolent, et Staline pour un souffre-douleur. Dans un autre, cela tourne à l’assassinat posthume, le biographié ne valait pas l’encre pour signer son nom, au point qu’on se demande comment un homme vêtu de candide probité et de lin blanc, a pu gâcher six cent pages et consacrer deux ans de sa vie à un homme qui, comme disait l’autre, n’était pas son genre. Et maintenant les pires : à partir d’un portrait à charge, unilatéral et biaisé, le biographe essaie de discréditer l'œuvre ou la pensée d’un auteur. Une démarche qui connaît ces jours-ci un retour de flamme – c’est le mot juste. Bref, une bonne biographie, c’est comme un footballeur professionnel qui serait simultanément agrégé de philosophie : certes pas impossible en théorie, mais tout de même point si fréquent.

Hé bien, voici une excellente biographie. Antoine Blondin (1922-1991) était cet auteur apparenté à ce que l’on appela, d’après Bernard Frank, les hussards, désinvoltes en littérature et rageux en politique, mélanges paradoxaux et parfois savoureux de hargne et de fantaisie. Et ce qu’affirme tranquillement cette biographie, c’est que si Roger Nimier aura été le plus connu des dits hussards, le meilleur était bien Blondin. Prose merveilleuse, déliée, souple : « Le général de Gaulle dirige la France onze mois par an, en juillet c’est Jacques Goddet »; humour constant, léger, désinvolte ; talent de romancier, et largement autant, quoique plus inattendu, de chroniqueur sportif. Si « Le Monde » a hébergé plusieurs grands écrivains, si « Le Figaro » a été la maison de campagne, la résidence secondaire et le relais de poste d’un Mauriac ingambe et sadique, si « Libé » attend toujours le sien, « L’Equipe » aura eu Antoine Blondin. Comme « Un singe en hiver » (1959) l’évoquait déjà, par une anticipation qui échouera à devenir conjuratoire, la fin de vie de Blondin se consumera dans l’alcoolisme. Et alors ? Je pourrais citer dix auteurs carburant à l’eau claire – et ennuyeux comme la pluie.

Qu’est-ce qu’une biographie réussie ? Hmmm. Essayons ceci : un livre qui vous rend son principal protagoniste plus attachant que réellement sympathique, et qui vous invite à relire les œuvres de cet auteur. Pari tenu.

 

Alain Cresciucci, « Antoine Blondin », Gallimard, 2004.

DISPONIBLE.

Lecture-savoir.

Document réalisé par L. LE TOUZO, le 5 mars 2010

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