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10 mars 2011 4 10 /03 /mars /2011 15:55

Au menu de la soirée débat du 19 avril     

 

Chantre de longue distance sarcastique et satirique de la middle class américaine, John Updike (1932-2009) aura toujours cherché, et souvent atteint, l’équilibre miraculeux, et éminemment littéraire, entre émotion et dérision. Son oeuvre vaste et protéiforme est bordée, à l’Ouest par la tétralogie augmentée des Rabbit de « Coeur de lièvre » (1960) à « Souvenirs de Rabbit » (2000), et à l’Est par la trilogie truquée des Bech, de « Bech voyage » (1970) à « Bech aux abois » (1998). Harry « Rabbit » Angstrom, héros de la première saga, est un concessionnaire automobile inconstant en toute chose, nonchalant et sexy, aimant trop les sucreries, et Henry Bech, protagoniste de la seconde, est un écrivain juif fameux et assez craintif. Trop d’émotion chez Rabbit, trop de dérision chez Bech ? Trop de clins d’œil, aussi, de l’auteur à ses propres livres. Mais toujours une langue superbe, baroque et surchargée, diaprée, irisée, sinueuse, sifflante,  ondoyante. Grand prosateur, romancier inégal.

Soit. Dans ces conditions, « Tu chercheras mon visage » (paru en 2002 aux Etats-Unis, traduit en France en 2006) est peut-être à la fois une bonne introduction aux oeuvres complètes d’Updike, et, pourquoi pas, son atout maître secret, son chef-d’œuvre dissimulé en pleine lumière. Disons le mot : son meilleur livre. Ample sans être bavard, virtuose sans être esbroufeur, maîtrisé sans être essoufflé. Le prétexte de cette fresque qui revisite à bride abattue un demi-siècle d’histoire des Etats-Unis est la longue confession feutrée et digressante de Hope Mac Coy, veuve de Zack, peintre célèbre suicidé, épousant en secondes noces Guy Holloway, autre peintre célèbre dont elle divorcera, et elle-même peintre. Les thésards en histoire de l’art reconnaîtront sans doute ici un roman à clés (Pollock et Warhol ?), mais les béotiens dont nous sommes se laisseront porter par le flux d’une narration superbement tenue, qui traverse les époques avec comme fil conducteur indestructible une passion, d’ordre quasi religieux, pour la peinture. Hope raconte, avec un mélange diablement sexy de vivacité et de liberté ses amours, ses désillusions et ses engagements. Updike s’est magnifiquement documenté, et tout sonne vrai ; la bohème et le blé, la passion de peindre et le désir d’autodestruction, les amours collatérales et les fâcheries politiques. Si ce superbe livre a un motif avoué, la peinture, il mène à bon port, sans le côté démonstratif qui l’entache parfois, l’une des idées fixes de l’auteur : la montée de la puissance féminine. C’est un roman d’éducation et d’émancipation que confesse Hope, passée d’un patriarcat irréel à une égalité précaire et menacée. De Sarah Palin à Hillary Clinton ? Mouais. Plutôt de la desperate housewife, type « Ma sorcière bien aimée » à Ally Mac Beal.

 

 

John Updike, « Tu chercheras mon visage », Seuil, 2006. 

Lecture-voyage.

DISPONIBLE.            

 Document réalisé par L. LE TOUZO, le 16 février 2011 

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